Le droit à l’avortement en 2018 : en progression ou menacé ?
Bien que acquis depuis 1975 en France, aujourd’hui majoritairement considéré comme fondamental pour les droits des Femmes (exception sera faite de la Marche pour tous), l’avortement est pourtant encore interdit dans une vingtaine des pays du globe. Au cours de l’année 2018, ce droit a encore évolué, a gagné un peu de terrain, mais reste menacé. Petite rétrospective.

Parce qu’un peu de bonnes nouvelles fait du bien, on se rappellera d’abord de l’année 2018 comme d’une grande victoire, en Irlande. Le 25 mai dernier avait lieu un référendum constitutionnel sur la légalisation de l’avortement, ou plutôt sur l’abrogation du 4e amendement, qui l’interdisait. Parmi une participation record de 61% des citoyens, ce sont 66% de « oui » qui ont été comptabilisés à la fin du vote. Malgré une partie de la population fervente défenseuse du « non », le premier ministre Léo Varadkar a souligné l’importante base de soutien donnée par ce vote et félicite l’avancement progressiste de la société irlandaise, historiquement très conservatrice car très religieuse. Il ne restait plus au parlement qu’à autoriser l’avortement par une loi ordinaire. C’est donc une loi historique qui a été votée le 13 décembre dans la chambre irlandaise, et qui par son approbation légalise officiellement l’IVG. Un beau cadeau de fin d’année.
De l’autre côté de l’Atlantique, il est plus difficile de parler de progressisme. L’arrivée au pouvoir de Trump aux États-Unis en 2016 et de Bolsonaro au Brésil en novembre dernier ont accéléré une fragilisation de ce droit déjà instable dans les deux pays. Au Brésil tout d’abord, la décriminalisation de l’avortement avait commencé à être discutée à la Cour Suprême en août, alors que la législation ne l’autorise seulement en cas de viol, de malformation ou de danger vital pour la mère. Mais le populiste Bolsonaro et ses positions extrêmes en terme de questions sociales risquent fortement de mettre fin à cette discussion, le nouveau président étant formellement opposé à cette pratique médicale. Comme d’ailleurs à toutes pensées progressistes, ce qui inquiète les communautés LGBT+, étrangères du Brésil et les écologistes du monde entier. Avec le début de cette nouvelle présidence, l’évolution du pays est à suivre avec la plus grande attention.
Au le nord du continent, aux États-Unis, l’avortement est légal dans tous les États depuis l’arrêt Roe V. Wade voté en 1973, qui le considère comme protégé par le XIVe amendement de la Constitution, mais avec des législations plus ou moins restrictives. Les gouverneurs les plus conservateurs ont été encouragés par la nouvelle présidence dans leurs démarches de fragilisation de ce droit, à tel point qu’il est remis en question dans certains états, avec l’absence de cliniques pratiquant cette intervention et la baisse considérable des moyens donnés aux planning familliaux. En outre, sans le décret Wade, il serait très probablement interdit dans une vingtaine d’états, tels que le Mississippi ou le Nebraska. Mais les dernières élections du Congrès de novembre, poussent à l’optimisme puisque de nombreux démocrates, jeunes, femmes, américains d’origine étrangère, ont été élus et comptent bien mettre à mal la politique de Trump. Pour la plupart démocrates et progressistes, de part leur identité et leur parcours, ils peuvent changer la donne au sein du Congrès et faire front aux propositions républicaines.

L’année 2018 est donc en partie porteuse d’espoir réduisant encore le nombre de pays où l’avortement est illégal. Mais ce droit est encore en danger et son acquisition ne le rend pas immuable. Il reste encore à se battre pour la vingtaine de pays dans le monde le condamnent complètement mais aussi pour les pays où il reste en danger. La légalisation de l’avortement ne permet pas de faire soudainement apparaître cette pratique dans un pays mais de donner un cadre médical et sanitaire à des interventions jusque là conduites clandestinement. La reconnaissance de l’IVG comme un droit n’est rien de moins qu’une garantie de vivre pour toutes ces femmes qui n’auront plus à se cacher. Ça vaut le coup de se battre, non ?