Transition écologique : où en est la France ?
Les français-e-s considèrent de plus en plus la protection de l’environnement comme l’une de leurs principales préoccupations. 51% (1) se disent même prêt-e-s à changer leur mode de vie de façon conséquente pour sauver notre belle planète bleue. Mais quels progrès avons-nous accompli ? Quels défis doivent encore être relevés ?
Il est vrai que les questions environnementales sont de plus en plus présentes dans le débat public. La dernière campagne présidentielle de 2017 que nous avons vécue en est la preuve. Deux des cinq « gros candidat-e-s », Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon, avaient fait de l’écologie un des piliers de leur programme, poussant les autres candidat-e-s à investir ce terrain qui a semblé hasardeux pour certain-e-s. Néanmoins, l’écologie est souvent reléguée au second plan par la sphère politique, préférant parler, dans le contexte actuel, de la (non-)sortie de l’euro, de burkini, de crèche dans les mairies et de drapeau européen à l’Assemblée nationale.

Quelques bases…
Tout d’abord, il est important de bien distinguer la transition écologique de la transition énergétique. Même si ces deux termes désignent des choses relativement proches, la nuance est à souligner. La transition énergétique ne concerne que la production et consommation de l’énergie. Le défi de la transition énergétique est de changer nos modes de production de l’énergie, c’est-à-dire arriver à remplacer les énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole) et l’énergie nucléaire par des énergies renouvelables tout en diminuant notre consommation globale d’énergie qui est, rappelons-le, excessive. La transition écologique, elle, constitue un challenge beaucoup plus grand. En effet, elle désigne toutes les méthodes, pratiques, techniques pour lutter contre le changement climatique. De ce fait, elle englobe la transition énergétique ainsi que la lutte contre la pollution de l’air, de l’eau, la lutte contre les déchets, les défis de l’agriculture…
La transition énergétique
La transition énergétique reste l’un des défis majeurs de la transition écologique. De nos jours, en France, les énergies renouvelables ne représentent que 9,6% de la consommation d’énergie finale en 2015 et 19,1% de la production d’électricité selon le Ministère de l’Environnement, de l’Energie et de la Mer. Le pétrole est l’énergie la plus consommée en France (45,1%), suivie par l’électricité (22,9%), produite à 72,3% par le nucléaire.
Le nucléaire est une source d’énergie controversée : certain-e-s l’estiment peu polluante car elle ne rejette pas de gaz à effets de serre qui favorisent le réchauffement climatique (à l’inverse du pétrole, du charbon et du gaz), tandis que d’autres dénoncent le fait que les déchets radioactifs sont extrêmement dangereux pour l’homme et pour la planète et que de nos jours, ces déchets sont enterrés en attendant qu’ils se dégradent, dégradation qui durent des centaines de milliers d’années pour certains déchets. De plus, certain-e-s considèrent le nucléaire dangereux car les accidents comme à Tchernobyl en 1986 ou plus récemment à Fukushima existent. Dans le contexte politique actuel, les centrales nucléaires représentent également un risque pour de futurs actes terroristes.
Concernant le futur de cette transition énergétique, en 2015, la ministre de l’Environnement Ségolène Royal avait proposé une loi, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte adoptée par le Parlement. Cette loi, critiquée car jugée pas assez radicale pour les plus écologistes, prévoit la diminution de 50% de l’énergie finale consommée en France pour 2050, la réduction de 40% des gazs à effet de serre pour 2030, la réduction de la production d’énergie fossile de 30% (en se basant sur l’année 2012) pour 2030, l’augmentation de la consommation finale brute d’énergies renouvelables à 32% en 2030 et la réduction de la part du nucléaire à 50% d’ici à 2025. Dans son programme, Emmanuel Macron avait garanti qu’il respecterait les objectifs de cette loi sans pour autant annoncer d’autres mesures. Néanmoins, son ministre de l’Environnement, Nicolas Hulot a annoncé courant septembre 2017 un « plan climat » qui prévoit notamment, dès 2019, de verser une prime aux foyers isolant leur habitation pour lutter contre les passoires énergétiques, prime versée dès la fin des travaux effectués et non plus un crédit d’impôt versés plusieurs mois après.
La pollution de l’air
La pollution de l’air est responsable de 48 000 décès prématurés en France par an. Lutter contre la pollution de l’air est donc un enjeu de santé publique. Auparavant, les grandes usines tournant au charbon étaient celles qu’on pointait du doigt quand il s’agissait de pollution de l’air. De nos jours, un bon nombre d’usines ont fermé suite à la tertiarisation. Des usines polluantes existent toujours mais le vrai défi est de réduire la place de la voiture diesel dans une société de l’automobile ainsi que les systèmes de chauffage polluants, celui au fioul notamment. Le plan climat de Nicolas Hulot prévoit d’ailleurs la convergence diesel-essence en 4 ans pour aligner la fiscalité du diesel sur celle de l’essence, ainsi que la création de « certificats d’économie d’énergie », c’est-à-dire une aide financière pouvant aller jusqu’à 3 000€ versée pour les foyers les plus modestes abandonnant les chaudières au fioul très polluantes et s’orientant vers des énergies renouvelables comme le bois ou les pompes à chaleur. Au niveau des métropoles, certaines mesures sont également appliquées pour favoriser les transports en commun et faire reculer l’automobile comme la controversée piétonisation des berges de la Seine soutenue par Anne Hidalgo.

Il faut noter que la pollution atmosphérique a diminué entre 2000 et 2015 : on retrouve dans l’air 74 % de dioxyde de soufre en moins en 2015, les émissions d’oxydes d’azote (NO et NO2) ont chuté de 47 % entre 2000 et 2015 et les émissions de particules fines ont baissé de 39%. Malgré tout, le ministère de l’Environnement précise qu’il existe “de grandes disparités selon les polluants et leurs origines.” La bataille n’est donc pas totalement terminée. De plus, les pics de pollution sont de plus en plus fréquents dans les grandes agglomérations. Cela est dû notamment à la météo : le soleil et l’absence de vent favorise la suspension de particules fines. Réduire encore plus les particules fines en luttant contre le diesel et le chauffage au fioul reste donc toujours un défi à relever.
La pollution de l’eau
En France, la principale pollution de l’eau est la pollution au nitrate et aux pesticides. Selon l’UFC Que Choisir ?, le nitrate est présent sur 15 % du territoire à des taux supérieurs à 25 mg/l, un taux qu’il ne faut pas dépasser pour que l’eau soit potable. Plus alarmant encore, 43% des eaux souterraines du territoire français dépassent l’indice européen de référence à ne pas dépasser concernant le nitrate. Selon le même organisme, on retrouve des pesticides dans la moitié des rivières françaises et dans un tiers des nappes phréatiques. Les gouvernements successifs se sont engagés à réduire de moitié l’usage des pesticides d’ici à 2018 dans un premier temps puis d’ici à 2025 dans un second temps. Néanmoins, on observe que l’utilisation de pesticides a augmenté de 18% en 5 ans. Cette pollution de l’eau est dûe à l’agriculture intensive et productiviste.
L’agriculture
L’agriculture est en effet fortement liée au dessein écologique de la France pour plusieurs raisons. Tout d’abord, elle est la principale source de pollution de l’eau à cause du nitrate et des pesticides. Deuxièmement, elle alimente le réchauffement climatique. En effet, selon Reporterre, l’agriculture (notamment l’élevage) représente plus de 20% des émissions françaises de gaz à effet de serre. La France est le premier producteur de viande bovine en Europe et l’élevage bovin est plus polluant que les autres élevages à cause du méthane dégagé, qui est par ailleurs un gaz 28 fois plus « réchauffant » que le dioxyde de carbone des voitures et chauffages. Enfin, l’agriculture est source de défrichement. Nous avons tendance à oublier qu’en France des zones ont été défrichées il y a plusieurs siècles pour permettre de produire plus. Le problème reste bien entendu beaucoup plus important en Indonésie ou au Brésil de nos jours avec la forêt de Sumatra et l’Amazonie.
Les solutions pour lutter contre toutes les formes de pollution liée à l’agriculture existent : réduire la production de viande, produire bio, arrêter l’agriculture intensive… Même si des progrès ont lieu (il y a de plus en plus de végétarien-ne-s ou flexitarien-ne-s en France, le bio se vend de plus en plus, certain-e-s agriculteur-trice-s changent peu à peu leur mode de production…), rien n’est fait par le gouvernement pour arrêter totalement l’agriculture intensive et passer à une agriculture plus raisonnée et moins polluante comme la permaculture, un système agricole se basant sur des techniques de l’agriculture paysanne remise au goût du jour pour produire plus sur des surfaces moindres tout en respectant l’environnement.
La gestion des déchets
Concernant les déchets, en 2008, l’Union européenne s’était fixée comme objectif de recycler 50% des produits ménagers avant 2020. Selon Eurostat, 36% des déchets ménagers en 2008 étaient recyclés. Ce chiffre est de 45% en 2015. Si on isole la France, nous sommes passés de 33% des produits ménagers recyclés en 2008 à 39,5% en 2015. La France est sur la bonne voie. Néanmoins, elle reste à la traîne si on se penche sur le cas de nos voisins européens : l’Italie et le Royaume-Uni sont à 43,5% et l’Allemagne à plus de 66% des déchets ménagers recyclés. La Pologne a même réalisé une augmentation folle, passant de 10,5% en 2008 à 42,5% de produits ménagers recyclés en 2015. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte adoptée en 2015 prévoit toutefois une augmentation de 10% du recyclage des déchets ménagers d’ici à 2020.
Toujours selon Eurostat, concernant le compostage, la France se classe plutôt bien. Elle est en 6ème position avec 87 kg, derrière l’Allemagne cependant avec 114 kg de déchets compostés par an par habitant. L’Autriche caracole au sommet du classement avec 175kg.
Et le réchauffement climatique ?
La transition énergétique (avec le dioxyde de carbone rejeté dans l’atmosphère par le gaz, le charbon et le pétrole), la pollution de l’air (avec le dioxyde de carbone rejeté par les voitures et les chauffages) et l’agriculture (avec le méthane rejeté) sont les principaux facteurs du réchauffement climatique qui ne concerne pas que la France mais le monde entier. Le réchauffement climatique était estimé en 2014 entre 3,2 et 5,9 degrés. En 2017, des experts de l’ONU viennent d’affirmer qu’il sera probablement plus important que tous les scénarios imaginés : il pourrait être supérieur de 0,5 degré à ces prévisions. L’accord de Paris (COP21) de 2015 fixant l’objectif d’une augmentation des températures de 1,5 à 2 degrés maximum semble donc compromis, avec en dernier coup de massue le retrait du deuxième plus gros pays pollueur du monde, les Etats-Unis, d’ici à novembre 2020.
(1) Chiffre 2017 de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie)
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