Interview d’un talentueux photographe
Durant Cabourg, Mon Amour, nous croisons régulièrement devant la scène Jacques-Henri Heim, un photographe bénévole du festival. Toujours armé de son vieil argentique, celui-ci capture les expressions, les moments de partage des artistes sur scène. Il dénote dans le festival. Le style de l’argentique contraste avec l’ambiance branchée de Cabourg. Sur son compte Instagram, nous découvrons les portraits des artistes faits en backstage. Les photos sont en noir et blanc. Sa technique photographique, aujourd’hui délaissée, lui permet de capturer avec justesse l’émergence artistique.
Comment t’es-tu retrouvé à couvrir le festival ? Est-ce la première fois que tu fais cela ?
« Je me suis retrouvé au festival de Cabourg parce que j’ai travaillé dans une web radio qui s’appelle Radio Piiaf, et j’étais photographe là-bas. Je faisais les portraits de toutes les personnes qui venaient. Et un jour, pour une émission, Jean-Baptiste Devay, qui est l’un des organisateur de Cabourg, et Ichon (rappeur), sont passés et je leur ai fait leur portrait. Jean-Baptiste Devay a aimé mon travail. J’ai profité de l’occasion pour savoir s’il ne cherchait pas un photographe pour Cabourg. J’ai été accepté. »

Comment ça s’organise, as-tu des consignes données par le festival ?
« On était trois photographes officiels, et on n’avait pas vraiment de consignes, juste faire des photographies des partenaires. Une fois ce travail fait, on était complètement libres, on pouvait faire des photographies des artistes qu’on voulait. Les photographes qui étaient avec moi avaient des styles complètement différents. C’était très intéressant. Simon était photographe de théâtre et faisait des photos avec des focales (objectifs) longues et des cadres très serrés. Edouard, lui faisait du moyen format numérique. Et moi, je faisais de l’argentique couleur et noir et blanc. J’ai été un peu étonné qu’ils acceptent que je fasse de l’argentique. »
Quelle est l’ambiance en backstage avec les bénévoles et les artistes ?
« Ce que j’ai beaucoup aimé avec Cabourg, c’est que c’est un festival où il y a une proximité avec les bénévoles, les organisateurs et les artistes. L’ambiance était bien. Il n’y avait pas de hiérarchie. On se retrouvait à parler et manger avec les artistes. Par exemple, j’ai mangé en face de Cigarettes After Sex. C’était vraiment bien, tout le monde jouait le jeu. Il n’y avait pas d’artistes qui refusaient de manger avec nous.
Pendant l’after, dans l’endroit backstage du Casino, le dernier soir, on a passé une très bonne soirée avec Polo & Pan. Ils se sont amusés à faire du limbo et des roulades par terre. J’ai une très belle photographie. Ce qui était bien, c’est qu’il y avait des gens de la restauration qui faisaient des roulades avec le groupe. Combien de festivals ont ça ? Où voit-on des artistes s’amuser avec les bénévoles ?
Ce n’est pas un gros festival, ce n’est pas Rock en Seine, mais ce n’est pas non plus un petit festival. C’est une scène qui reste parisienne mais dans un cadre particulier, face à la mer. »

Quel moment as-tu préféré capturer ?
« Ce que je faisais, c’est qu’à 14 heures, j’allais dans les loges et j’essayais de faire leur portrait entre leurs interviews. Je fais beaucoup de portraits. La captation de concert n’est plus mon plaisir à moi. Je faisais beaucoup de portraits, j’adore faire des portraits des artistes et des gens. Ce sont donc les portraits que j’ai préféré capturer. J’aime bien diriger un portrait. Sur scène, tu ne fais que de la photographie informative. »
Est-ce qu’il y a un artiste avec lequel un lien particulier s’est tissé pendant que tu lui tirais le portrait ? Une sorte d’osmose ?
« La difficulté avec les portraits d’artistes, c’est que je dois connaître l’esprit de l’artiste, son univers et un peu de sa personne. Ensuite, je dois mettre ça en valeur tout en faisant une photo assez stylisée avec mon appareil. Sinon, autant le faire avec mon téléphone.
Mon regard ou mon sentiment sur la personne que je photographie peut être de l’admiration, du désir ou tout simplement de la beauté physique ou artistique. Je n’ai jamais appris comment on faisait des shootings alors je le fais comme je le sens. Je ne prévois jamais vraiment, je ne me dis pas « je vais faire ça », ou visualiser la photo dans ma tête avant. J’aime ce côté un peu challenge de trouver quelque chose d’intéressant avec toutes les contraintes que j’ai pu te citer au dessus. »
Note de la rédaction : nous remercions chaleureusement Jacques-Henri Heim pour l’utilisation de ses photos.

image de couverture : © Jacques-Henri Heim