Asselineau is back
Pour la Braderie de Lille, les 2 et 3 septembre, le candidat malheureux de l’UPR à l’élection présidentielle est venu à la rencontre de ses militants. L’occasion pour nous d’interroger le fossoyeur de l’Union Européenne et de l’OTAN sur un sujet qu’il a très peu évoqué : les jeunes.

Entre le stand du Parti fédéraliste européen et de la France Insoumise, une foule compacte gravite autour de François Asselineau, président fondateur de l’Union Populaire Républicaine (UPR), Monsieur 0,92% le 23 avril. Le parti qui montait, « malgré le silence des médias », admet à demi-mot son échec. Olivier Durnez, délégué du Nord, souligne tout de même une réussite : être apparus dans le paysage politique et médiatique français. Un paradoxe pour un parti qui accuse les médias de l’invisibiliser. S’il est évident que les « petits candidats » ne bénéficient pas d’une aussi large audience que les Fillon, Macron, Mélenchon et autres, certains ont tout de même réussi à se distinguer durant la campagne, notamment grâce à leur verve pendant les débats : on se rappelle de l’immunité ouvrière lancée par Philippe Poutou. Monsieur Asselineau est quant à lui resté en retrait, caricaturé pour ses citations répétées de textes constitutionnels et assimilé à ses deux (et uniques ?) mantras : le Frexit et la sortie de l’OTAN. Frappés par l’absence totale de propositions concernant la jeunesse dans son programme présidentiel, nous lui avons donné l’opportunité d’y remédier.
Le tirage au sort à l’université ? – « C’est une injustice totale »
C’est complètement ridicule ! Il est inadmissible que quelqu’un qui a un Bac avec de très bonnes notes ne puisse pas entrer à l’université parce que le hasard en a voulu autrement, et ceci au profit de quelqu’un qui n’a pas eu d’aussi bonnes notes. C’est une injustice totale, très perfide et hypocrite. On fait croire aux jeunes français qu’il n’y a pas de concurrence et une fois que les gens sont lancés dans la vie professionnelle, on s’aperçoit que c’est « struggle for life ». Je suis pour que l’on revienne à une grande tradition républicaine, l’ascenseur au mérite. D’ailleurs, c’est ce qui a fait la gloire de la République française : que des enfants de classes sociales défavorisées ont pu avoir accès aux plus hautes fonctions de l’État.
L’ascenseur social… Décidément un mythe bien ancré. Il faut toutefois rappeler que celui-ci est en panne depuis le début des années 1980. De même, la méritocratie ne pourra être que réellement efficace si tous les élèves partent du même niveau : il faudrait pour cela les inégalités d’accès à la culture, à l’information sur les filières etc. Un peu vintage François ?
© Bash Pour l’alter ego/APJ
La baisse des APL ? – « Une très grande maladresse politique »
Gratter cinq euros par mois, c’est minable. Lorsque les Français voient qu’on leur enlève cinq euros par mois et que par ailleurs on apprend que M. Macron dépense 9 000 euros pour se faire maquiller aux frais de la princesse… Il y a des choses qui ne vont pas. Les Français sont un peuple très susceptible sur les questions d’égalité. Quand on pense aux dizaines de milliards d’évasion fiscale permis par l’article 3 du Traité de l’Union européenne sur la libre circulation des capitaux, c’est honteux de retirer cinq euros à des étudiants.
Si nous vous avions promis la citation d’un traité, il ne s’agit en réalité pas de l’article 3, mais plutôt 63, même le site de l’UPR le dit…
Le manque de places à l’université ? – Le problème n’est pas là.
Je pense que c’est une erreur de vouloir que 80% d’une classe d’âge aille à l’université. C’est de la démagogie. À quoi ça sert d’avoir une licence en sociologie ou en littérature pour vendre ensuite des Big Mac chez McDo ? Dans les pays comme le nôtre, on aime bien les peaux d’âne, les diplômes. En Allemagne, vous avez des jeunes qui sont orientés à partir de 14-15 ans vers un cycle d’apprentissage, alors qu’en France, il a mauvaise presse. Je pense qu’il faudrait revaloriser l’apprentissage, montrer que le bonheur n’est pas forcément de faire des études prétendues supérieures, si au bout du compte c’est le chômage.
Là pour le coup on est plutôt d’accord. Surtout quand on voit le taux de réussite en licence, qui est dans le meilleur des cas proche des 50%. Pour ce qui est de revaloriser l’apprentissage par contre, tout le monde le dit, tout le monde le pense mais on attend encore les actes. D’autre part, ce discours est souvent teinté de condescendance. Antoine Frérot, PDG de Veolia et ardent promoteur de ce système, a succombé à une question de Léa Salamé sur France Inter :
L’image des apprentis doit être plus belle en France. Je n’ai qu’une seule question : avez-vous poussé un de vos enfants à devenir apprenti ?
Non je ne l’ai pas fait parce qu’étant brillants à l’école, le problème ne s’est pas posé.
Mesdames et messieurs, Antoine Frérot, PDG de Veolia, en train de férocement défendre l'apprentissage. pic.twitter.com/ZpDNqEeCeU
— Jean-Claude Bidon φ (@JC_Bidon) August 30, 2017
Les moyens pour l’université ? – « Il faudrait certainement les augmenter mais… »
Si M. Asselineau ne conteste pas le manque de ressources financières criant dans l’enseignement supérieur, il n’avance ni chiffres ni propositions concrètes, la faute « aux contraintes du budget de l’État ». Et le candidat du Frexit de disserter sur la dette publique « excessive », la monnaie « surévaluée, sorte de sous-Deutschemark, trop chère pour l’économie française ». Cette monnaie trop forte renchérirait les contraintes budgétaires etc. On y revient toujours, la source de tous nos maux réside à Bruxelles… D’accord ou pas avec cette affirmation, là n’est pas la principale question. Compte tenu de la longueur d’une sortie de l’Union et de l’euro, quelles mesures immédiates prendre pour remédier à une situation sociale particulièrement inquiétante ? M. Asselineau, prompt à réagir à l’actualité, n’est que peu loquace sur les solutions à mettre en place.
© Bash pour l’alter ego/APJ
Le président de l’UPR justifie d’une manière originale l’absence de propositions pour la jeunesse dans son programme présidentiel :
J’ai refusé qu’il y ait une section jeune à l’UPR, pourquoi pas une section femmes, une section gays, handicapés… Pour moi, nous sommes tous des citoyens français.
Tous des citoyens français certes, mais avec des problématiques et des besoins différents. 14% de la population a entre 18 et 29 ans (1), soit environ 20% du corps électoral, une cible pourtant non négligeable pour quiconque espère être élu, d’autant que la situation des jeunes n’est pas reluisante : précarisation, difficultés d’accès à l’emploi, pauvreté… Par exemple, près de 20% des étudiants sont sous le seuil de pauvreté d’après l’inspection générale des affaires sociales (2).
L’ex-candidat répond « on veut libérer le pays » et détaille une mesure d’Erasmus améliorée… Bien maigre pour répondre à des enjeux aussi cruciaux…
(1) Statistique de l’INSEE, 2016
(2) Mission menée par François Chérèque en 2015
© image de couverture : © bash pour l’alter ego/APJ