Ça suffit !
Dernièrement, un documentaire – très juste – est passé sur France 5 sur la condition de certaines femmes battues ou violées en France. Reportage aussi instructif que profondément émouvant, qui nous donne à réfléchir sur le fonctionnement de nos institutions face à ce grave problème.
Le reportage cite en effet des chiffres très alarmants concernant notre pays :
1 femme sur 10 a déjà été battue par son congénère et 1 femme décède tous les 3 jours sous les coups de son conjoint, 1 femme sur 8 déclare avoir déjà été violée ou agressée sexuellement au cours de sa jeunesse…
Et dans 86% des cas, ces agressions horribles sont effectuées par un proche : un mari, un père, un oncle…
Et pourtant, malgré ces données alarmantes, il se trouve que seulement 20% des femmes agressées portent plainte. En effet, la peur des représailles, surtout lorsque l’agression est causée par un proche, est omniprésente. Pas étonnant, quand on voit que seulement 14% des plaintes de viol et environ 10% des plaintes de violence conjugale contribuent à une condamnation !
Si ces chiffres, qui ne sont que le paravent d’une réalité sinistre, sont aussi préoccupants, c’est en partie parce qu’il y a encore beaucoup trop de défaillances sur ce sujet dans la justice française, et notamment en ce qui concerne la prise en charge de ces femmes violentées, mais aussi des hommes violentés par un(e) conjoint(e), car s’il y en a moins, il y en a quand même.
Peut-être avez-vous, par exemple, entendu parler de la mort de Géraldine, en 2012, tuée avec ses deux parents sous les balles de son ex-compagnon. Cet homme violent et instable l’avait battue durant près de deux ans, et Géraldine avait fini par quitter leur foyer afin d’échapper à cette violence : un acte déjà difficile, surtout lorsqu’un homme vous menace de mort si vous le quittez. Réfugiée chez ses parents, elle continuait à se faire harceler et menacer par son ravisseur, et se plaignait régulièrement à la police. Pourtant, l’affaire n’a visiblement pas été prise très au sérieux puisque cet homme n’a pas été arrêté, ni mis en détention provisoire ou même réellement surveillé : il a d’ailleurs pu retrouver facilement sa victime et la tuer avec ses deux parents…
Cette histoire tragique transformée en fait divers morbide est un exemple parmi tant d’autres qui montre à quel point la prise en charge de ce genre de situation, même si elle s’améliore, peut s’avérer mauvaise en France, qui est pourtant censé être « le pays des droits de l’Homme »… Et de la Femme, ne l’oublions pas.
Il est donc assez révoltant de voir que les politiques et les journalistes sont capables de créer une futile polémique de plusieurs mois sur la question stérile et soi-disant féministe du « burkini », tandis que des centaines de milliers de femmes sont toujours victimes des violences plus ou moins graves de leur conjoint, ou d’un proche !
On peut dire que la plupart de ces bourreaux sont des hommes, qui gardent le monopole de la violence, qu’elle soit gestuelle, verbale… Mais les hommes battus par leur femme ou leur homme, évidemment, existent aussi, même si on les oublie malheureusement très souvent : en moyenne un homme meurt tous les treize jours sous les coups de sa compagne. En plus de la difficulté de « briser le silence », d’oser se plaindre et de se faire rendre justice, ces hommes sont souvent pris en dérision… Attitude injuste de la société encore patriarcale et mysogine dans laquelle nous vivons, qui en prônant une certaine forme de virilité et des rapports de force bestiaux, met en danger ses femmes et ses hommes.
image de couverture : © Amnesty International