Antoine de Caunes nous répond !
L’Alter Ego s’est rendu pour la première fois aux Solidays, sur l’hippodrome de Longchamp à Paris. La presse jeune dûment représentée s’est glissée dans l’envers du décor au contact de ceux qui font le festival et c’est le premier d’entre eux, le Président d’honneur, Monsieur Antoine de Caunes qui a accepté de répondre à nos questions. Confortablement installés au bar de l’espace presse, la discussion commence sous un soleil de plomb, les cris des festivaliers en fond sonore.

Voilà désormais seize ans que tu es Président d’honneur des Solidays. Quel regard portes-tu aujourd’hui sur ton festival ?
« Dès que l’association fut créée, Luc Barruet (Directeur et fondateur de l’association Solidarité-Sida) est venu me voir à Canal +, à l’époque de « Nul par ailleurs ». Il avait besoin d’une tête de gondole pour renforcer la communication.
Ce fut un honneur d’être associé à une telle association comme Solidarité Sida. Je suis particulièrement admiratif du travail effectué par toute l’équipe. Si je n’étais pas Président d’honneur, je viendrai comme simple citoyen aux Solidays. Le mode de communication adopté est selon moi le meilleur. On parle de sujets qui sont extrêmement sérieux et graves mais d’une manière légère et joyeuse. C’est ça l’esprit Solidays.
C’est une expérience unique. Il y’a toujours des moments qui nous reviennent en tête. La fois où sur la grande scène Luc était couché sur moi lors du Patchwork des noms, mon téléphone a vibré dans ses fesses. Nous avons eu un énorme fou rire mais le moment était assez mal choisi. C’était un instant de vive émotion où tous les festivaliers étaient couchés par terre, en mémoire de ceux qui ont été tués parce qu’ils avaient une sexualité différente de la « norme ». Cela symbolise pour moi ce mélange de sérieux et de convivialité. Le fond est apporté par tous ces gens qui travaillent pour les associations et qui se retrouvent sous le chapiteau. Ce sont des militants qui donnent leur temps et toute leur énergie pour des causes qui leur semblent justes. »
Penses-tu qu’il y a une prise de conscience de la population des risques que présente le virus du SIDA ?
« Honnêtement, c’est très difficile à juger ! Cela fait 24 ans que cette association existe, donc on devrait pouvoir en mesurer les effets, mais à chaque fois qu’il y a des études qui sortent, on se rend compte que les mômes de 18/20 ans recommencent les mêmes conneries. Cela nous incite à continuer. Il faut sans arrêt ré-activer ce message pour le faire passer. De toutes les façons la meilleure façon de dire qu’il faut se protéger c’est de continuer à parler de la vie. »
L’éradication du SIDA est-elle possible ?
« Je suis obligé d’y croire, je pense que cela va prendre un temps fou, déjà 25 ans que cela dure. Il y a du progrès qui a été fait au niveau médical et plus précisément en trithérapie. Cela reste très contraignant. Le SIDA est un virus qui continue de faire des dégâts considérables dans le monde et particulièrement dans les pays du sud mais aussi dans ceux, dans une moindre mesure, du nord. Il est certain que l’on trouvera le vaccin qui stoppera cette saloperie. Simplement, entre aujourd’hui et le moment où le vaccin tant attendu sera disponible à tous, il va encore se passer beaucoup de temps. »

Les artistes ont-ils, eux aussi, l’impression de faire une bonne action en venant se produire ici ?
« Je pense que les artistes qui viennent se produire ici, vivent vraiment Solidays, c’est unanime. Ils ne passent pas juste comme cela, ici, il se passe quelque chose qui ne se passe pas dans un festival traditionnel. Ils sont extrêmement sollicités et malgré cela ils prennent de leur temps pour partager un moment d’émotion avec les festivaliers. Ce sont les nouveaux talents, les reflets du moment qui viennent aux Solidays. On essaie d’en donner pour tous les goûts. Pop, Rock, Electro, chanson. Il y’a 80 concerts et 8 scènes. C’est un bordel permanent pendant 3 jours. Moi quand je suis ici, je suis au paradis, je m’amuse comme un gamin ! Ce n’est peut-être pas raisonnable mais j’adore ce lieu »
Un mot sur l’actualité. Le sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne, bonne ou mauvaise nouvelle ?
« Moi je pense que c’est une très mauvaise chose. L’idée que l’on peut se faire de l’Europe : c’est l’union des peuples, la paix et être main dans la main pour tenter de parvenir aux mêmes objectifs. Après l’Europe telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, je peux comprendre qu’elle puisse émettre quelques réserves. Il faudrait revoir l’Europe politique, l’Europe administrative, cesser les différences de traitement en fonction des pays. Il y a beaucoup de débats mais ce n’est pas parce qu’ils sont nombreux qu’il faut lâcher le bébé. Pour moi, les anglais sont tellement importants dans le dispositif tant économiquement qu’intellectuellement. La culture anglaise est capitale en Europe. Les « British » ont toujours été à part. Ce sont des tarés comme les japonais. Il faut, plus que jamais, garder le projet européen mais il faut le redéfinir dès aujourd’hui. Le départ de l’Angleterre ne doit pas être une porte ouverte aux idées nationalistes. Il y a des élections qui arrivent l’année prochaine et je serai très très énervé si ces élections là, après l’Angleterre, servaient de référendum. C’est un sujet tellement clivant, tellement facile à récupérer par des partis politiques peu scrupuleux. Je pense très directement au Front National, il faut se remuer et vite ! »
Quel message adresses-tu aux jeunes pour leur donner envie de se rendre aux Solidays ?
« Déjà, je m’étonne qu’ils n’y soient pas tous déjà. On va leur demander ce qu’ils faisaient pendant ce temps là et ensuite en attendant de venir je leur dirai de se protéger et qu’ils utilisent des préservatifs. Il y en a de toutes les formes, de toutes les couleurs, de toutes les textures de tous les goûts, alors qu’ils mettent des préservatifs, ce n’est pas un conseil de vieux con, c’est factuel et après qu’ils viennent me voir non pas pour qu’on les utilise ensemble mais juste pour en parler. »
image de couverture : ©Bash/APJ